🇫🇷 🎙️ La French #4 | Architectes + Architecte BIM manager ?
Pourquoi les architectes doivent-ils s'adapter à cette révolution BIM ?
Charles Victor est architecte BIM manager, et formateur REVIT dans une école d'architecture. Il répond à 6 questions en vidéos pour expliquer les caractéristiques techniques du BIM dans le monde de l'architecture, et les principaux enjeux pour l'avenir de la profession :
Une phrase pour décrire notre invité :
« Les BIM d’or, c’est une manière d’aller dans le sens du grand plan numérique du gouvernement et, dans notre cas, c’était une récompense sur les bâtiments neufs de moins de 5000 m². On a donc réalisé pour Habitat 76 une maquette informée en DOE dans un format qu’ils peuvent exploiter, de toute la construction, pour faire l’exploitation et la maintenance, et à terme, pour avoir une vision de la vie du bâtiment dans le futur. »
ARCHITECTE + REVOLUTION BIM
#02 A quoi sert un BIM Manager ?
#03 Un Architecte doit-il être un BIM Manager ?
#04 Quels sont les enjeux du BIM ?
#05 Quelle est la méthode de travail ?
#06 Quel est l’avenir pour les architectes ?
#01 C’est quoi le BIM ?
Building Information Modeling, c’est une première définition qui a été donnée. Aujourd’hui, on a plus tendance à dire Building Information Management. Cela représente le travail sur une maquette numérique, une maquette 3D informée, sur la capacité à rajouter des informations pour chaque objet. Chaque élément du projet peut être alimenté avec des informations, et celles que l’on souhaite. Autrement dit, on crée autant de champs nécessaires par objet, et ces champs sont à destination de chaque intervenant. Chacun remplit sa part, et chacun a accès automatiquement aux informations qui sont contenus dans chaque objet. Ce sont des informations règlementaires, techniques, quantitatives, et descriptives. On a quand même de plus en plus de gens qui commence à comprendre cette notion, et qui commencent à l’intégrer dans leurs projets. Ce qui est important, c’est de l’intégrer de manière intelligente, quand il y a un réel besoin. Cela apporte une valeur ajoutée, et j’ai l’impression qu’on progresse beaucoup en France sur le sujet.
#02 A Quoi sert un BIM Manager ?
Tout d’abord, il y a plusieurs niveaux de « BIM Manager ». Le rôle que j’ai en interne de « BIM Manager », ce serait plutôt celui que l’on pourrait définir comme « BIM Project Manager ». Mon travail autour du BIM, est d’arriver à travailler sur un gabarit commun avec toute l’agence. Cela permet de gagner du temps sur les questions de représentation, ainsi que, sur la liste des champs qui existent dans chaque objet pour ajouter de l’information, et enfin, de travailler sur des familles d'objets que tout le monde pourra utiliser. J’ai une espèce de responsabilité à essayer de faire un document homogène, et de faire un bon gabarit, qui va incorporer la charte graphique de l’agence, et toute la liste des paramètres des champs disponibles sur chaque objet. En tant que BIM Manager sur un projet, il faut avoir une vision de synthèse sur tous les objets BIM. Par exemple, vérifier que la structure respecte les normes. Ce n’est pas à moi de dessiner la structure, mais mon rôle est de m’assurer qu’elle est géoréférencée correctement lorsqu'on l’importe dans le projet, de m’assurer qu’elle respecte les normes de dessins, et de m’assurer que les champs d’informations qu’on a décidé de remplir pour ce projet soient remplis correctement. « BIM Manager » : c’est s’assurer que tous les intervenants respectent la charte qui a été convenue, et fabriquée au début du projet. On a des chartes génériques en fonction de chaque projet, de chaque intervenant, et on adapte notre charte en fonction du client et des attentes du client.
#03 Un Architecte doit-il être un BIM Manager ?
Certains domaines de l’industrie, dont l’aéronautique et l’industrie automobile, ont de l’avance face au BIM. Nos outils aujourd’hui sont inspirés de ces outils d’industriels. Toutefois, la grande différence c’est que, lorsqu’on fait du BIM ou de l’architecture, chaque élément est un prototype. Même si on va utiliser une partie des éléments industrialisés dans un bâtiment, on ne souhaite pas, et on n’aura jamais - sauf cas particulier - la reproduction d’un bâtiment de manière industrielle. Il y a toujours un cas particulier, des usages particuliers, et un site particulier. Je pense que l’architecte à l’avantage d’avoir une vraie vision de synthèse, et une vision globale sur le bâtiment. Je pense que c’est un des seuls à avoir une réflexion architecturale, structurelle, technique et aussi économique. Cela lui donne une vision globale sur le projet. Tous ces points l’intéressent, et la maquette informée lui permet d’avoir une vraie vision sur tous ces points. À mon avis, c’est la personne qui a le plus de sens à gérer une maquette numérique.
#04 Quels sont les Enjeux du BIM ?
C’est une question large, et c’est une question qui est liée à la révolution numérique de manière générale. Ce ne sont pas juste les architectes qui voient leurs métiers bouleversés. Aujourd’hui, beaucoup de métiers sont bouleversés par la révolution numérique. J’aurais tendance à dire que, plus on maîtrise les outils, plus on est en capacité à s’adapter, mieux on est armé face à cette révolution. C’est d’abord un outil qui permet d’avoir une vision globale, et c’est ensuite, quelque chose qui doit permettre aux architectes de se battre contre l’émiettement de leurs missions, pour ne pas juste au final, devenir un dessinateur de façades. Il faut garder la main sur la maquette, avoir une vision globale sur le projet, et comprendre absolument tous les tenants et aboutissants, avec cette maquette numérique qui contient tout. À mon avis, cela peut être quelque chose de très intéressant pour les architectes. Effectivement, la maquette est également un danger. On a un objet complet que l’on vient donner, et on perd la main sur cet objet. Mais c’est aussi une chance pour les architectes, de retrouver la main, la capacité à intervenir sur tout le projet : vérifier les quantitatifs des économistes, vérifier le dessin fluide en 3D des ingénieurs, et avoir un avis sur la structure. Il faut maitriser son projet de manière constructive, il faut maitriser son projet au niveau économique, même le maitriser de manière politique. Il faut arriver à trouver la bonne architecture, au bon endroit, pour les bonnes personnes.
#05 Quelle est la Méthode de Travail ?
Il y a effectivement un peu de changement de temporalité lorsque l’on travaille en maquette numérique. La mise en place d’un fichier sera forcément un peu plus longue que si l’on part d’une feuille blanche sur un logiciel vectoriel classique. Mais ce temps un peu plus long, c’est un temps que l’on récupère par la suite. On a, une fois que les choses sont bien mises en place, une meilleure capacité de modifications et de réactions, pour créer différentes variantes et différents types de modèles. Je pense que l’on récupère allègrement ce temps au fur et à mesure que le projet évolue. On va avoir tendance à adapter à chaque projet notre procédure BIM et notre organisation. Si on a un projet constitué d’une série de petites maisons, on ne travaillera pas forcément de la même manière que si c’est un grand bâtiment. Si on travaille sur un bâtiment avec des façades très complexes, on va avoir tendance à séparer la façade des cloisonnements intérieurs, afin de permettre à l’équipe qui travaille sur la façade d’avoir plus de libertés, et moins d’interactions directes avec les autres. Puis, on fera des échanges, des placements de fichiers de manière ponctuelle, et on discutera ensemble des différents points entre façades et cloisonnements intérieurs. Lors des formations BIM que j’ai faites, j’ai constaté une grande différence entre la formation, assurée par une personne du monde de l’architecture, et celle donnée par un informaticien. Ce dernier n’aura pas la même compréhension de nos attentes. Par exemple, tout le monde peut comprendre lorsqu’il s’agit de dessiner un mur. Mais le degré de liberté que l’on va souhaiter, dans la manière de dessiner notre mur, c’est peut-être quelque chose que, celui qui a fait des études d’architecture est plus à même d’appréhender, en trouvant les bonnes solutions pour l’architecte derrière.
#06 Quel est l’Avenir pour les Architectes ?
Je pense que c’est très important de rester ouvert à cette révolution numérique, et de s’intéresser à tout cela. Il y a une chose que je regrette dans mon enseignement, c’est de ne pas avoir fait de programmation. Cela peut paraitre un peu dur, dit comme cela, mais c’est pour comprendre mes outils, et être capable d’aller plus loin que ce que l’on me propose en « dur » dans les logiciels. Il va falloir bientôt être capable de venir faire un peu de programmation, parce qu’avec les révolutions numériques, cela va devenir vrai pour tout. Aujourd’hui, je pense que maitriser une troisième langue pourrait être intéressant pour avoir une compréhension de comment tout cela fonctionne. On parle de création, il y a de plus en plus d’artistes qui travaillent sur des questions technologiques, et qui font de la programmation. Je pense que ce n’est pas antinomique, que toute cette technologique ouvre des voies, et que le meilleur moyen pour que cela soit positif, c’est de les maitriser et de les comprendre. S’intéresser à cette révolution numérique, cela me semble primordial dans le domaine de l’architecture. C’est important, mais pas seulement. Il faut rester ouvert, comme on est traditionnellement ouvert au monde de l’art dans les études d’architectures. Je pense que la partie technologique, via le numérique, est très importante aujourd’hui, et ouvre des voies de liberté, de création qui sont très intéressantes.